Voilà un prénom qui m’a entraînée loin avec ses associations d’idées, d’Andréa Doria à Cervantès en passant par Dorian Gray
et même les lucioles. Petit tour du côté de l’étymologie (j’adore !) et découverte de deux significations : « Etoile qui brille de tout son éclat »ou « donner ». Et
comme le 1er mai est encore présent voilà mon histoire bigorbourgeoise hebdomadaire.
C’est la nuit entre le 30 avril et le 1er mai, Thècle la sorcière et Paterne le prêtre s’en
reviennent d’une balade nocturne secrète.
Les deux complices se congratulent, leur expédition annuelle s’est très bien passée.
Ils s’embrassent comme du bon pain avant de repartir chacun de son côté pour profiter du peu qu’il reste de
nuit pour se reposer.
Thècle tend au Père Paterne la belle boîte ouvragée qu’ils avaient emmenée avec eux. Il est temps que le bon
père ramène la petite Doria au bercail.
« Comment » vous dîtes-vous indignés « Thècle et Paterne gardent quelqu’un enfermé dans une
petite boite, c’est une honte ! »
Mais non, mais non. Ca ne gêne absolument Doria d’être enfermée, d’ailleurs elle n’est pas vraiment
cloîtrée, le coffret est très confortable et ajouré ce qui lui permet de respirer en toute liberté, encore qu’elle n’ait pas vraiment besoin de respirer.
Donc, avant de regagner son lit confortable dans le presbytère, le Père Paterne fait un détour par l’église
et va déposer Doria près du Bigorneau magique.
L’ange, coincé depuis fort longtemps dans le coquillage, voit avec plaisir revenir sa petite compagne. Après
être resté plusieurs centaines d’années sans personne avec qui papoter Blaise (je vais lui donner le même prénom que le fondateur de Bigorbourg qui l’avait ramené d’un pèlerinage improbable) a été ravi, lorsqu’il y a une bonne centaine d’années, une sorcière de la famille de
Thècle (ou était-ce Thècle elle-même, allez savoir) a confié Doria aux bons soins du prêtre de l’époque.
Mais qui donc est Doria ?
Doria est un minuscule morceau d’étoile filante. Elle est arrivée, un peu en catastrophe il faut le
reconnaître, sur notre terre justement une veille de 1er mai.
Elle a longuement rebondi de maison en maison avant d’atterrir dans le chaudron de Thècle première du nom
qui a dû la repêcher au fond de sa soupe.
Elle se demandait un peu quoi faire de ce drôle de caillou superbement scintillant et parlant, oui parlant,
enfin gazouillant parce que pour comprendre ce que racontait ce drôle d’E.T. c’était autre chose, lorsqu’au matin des cris de joie avaient retentis dans tout le village.
Derrière elle, la petite étoile avait laissé un sillage de clochettes délicatement parfumées qui mirent du
baume au cœur des Bigorbourgeois. Ce charmant cadeau de la nature leur plût énormément.
Notre sorcière décida donc que ce serait une bonne idée de demander à celle qu’elle avait baptisée Doria de
renouveler ce présent tous les ans. Seulement voilà, comment arriver à faire comprendre cette demande à ce caillou très bavard mais absolument pas bilingue.
Thècle numéro un alla donc prendre conseil auprès du prêtre (ni les sorcières, ni les prêtres ne sont
sectaires à Bigorbourg). Celui-ci fut tout aussi embêté, lorsqu’un gazouillement similaire à celui de l’étoile se mit à émaner du Bigorneau magique, Blaise l’ange, créature des grands espaces
parlait la même langue que Doria et comme lui comprenait les humains il lui fût facile d’expliquer ce que les terriens attendaient d’elle.
Enchantée d’avoir trouvé quelqu’un à qui parler, Doria accepta volontiers la mission de planter quelques
graines de bonheur une fois l’an, reconnaissez que le rythme de travail n’est pas excessif.
Et c’est ainsi que depuis, tous les 30 avril lorsque la nuit est tombée, la sorcière et le prêtre du village
sortent en catimini, ouvrent le coffret et laissent Doria jouer à saute-mouton au milieu des maisons.
Ensuite, c’est avec bonheur qu’elle rejoint son grand ami dans la petite église où tous deux peuvent pépier
tout leur content !